![]() |
Bulletin numéro 7 |
Juin 1965 |
Raoul Germond |
LA RÉSERVE SEIGNEURIALE DES FEUILLANTS.
Question de Mme Wattrin. - Je suppose que ce que vous dites, dans le n° 6 du bulletin, des revenus d'une terre et seigneurie s'applique exactement aux prieurés de Mauzé. S'il en est ainsi, sait-on quelle était la réserve seigneuriale des religieux Feuillants ?
Les prieurés St Pierre et Ste Croix de Mauzé ayant été unis aux Feuillants du monastère royal St Bernard de Poitiers, c'est le prieur de ce monastère qui, agissant au nom des religieux, était le seigneur des prieurés de Mauzé. Il était également seigneur de Jouet.
Ce qui a été dit des seigneuries en général s'applique effectivement aux prieurés de Mauzé. Une grande partie des terres relevant de ces prieurés avait été concédée à perpétuité à des tenanciers.
Voici, par exemple, un bail du 25 octobre 1696. Le R.P. Dom Jean-Baptiste de Ste Marie, prêtre, religieux Feuillant du monastère royal de la ville de Poitiers, prieur des prieurés St-Pierre et Ste Croix de Mauzé et seigneur de la seigneurie de Jouet et des fiefs et terres en dépendant, faisant tant pour lui que pour les autres religieux du monastère, cède, délaisse, quitte, à titre de bail perpétuel et irrévocable, à Pierre Pouvreau, maître cordonnier, demeurant à Mauzé, deux journaux de terre incultes depuis trente ou quarante ans, situés proches le fief du Moindreau, pour et moyennant la charge que le preneur sera tenu de cultiver la dite terre en nature de vigne et d'en payer au seigneur bailleur, annuellement, le douzain des fruits pour droit de complant, lequel douzain s'oblige le preneur à porter au treuil de la seigneurie de St Pierre et Ste Croix ou en la maison du fermier général des R;P. Feuillants. Paiera en outre le dit preneur la dixme aux dix-huit au R.P. prieur de Gram.
A la veille de la Révolution, les dixmes des prieurés rapportaient environ 2.300 livres, les terrages et complants 2.500, les cens -(tant en blé qu'en argent)- 800, les lods et ventes de 2 à 300.
Le moulin de Jouet avait été depuis longtemps cédé à titre de bail à rente et le farinier devait livrer chaque année aux religieux 98 boisseaux de froment et 98 de méture.
La réserve seigneuriale des Feuillants était importante. Outre les restes du prieuré St Pierre en grande partie détruit lors des guerres de religion, elle comprenait la métairie de la Grange (de St Pierre), celle de l'Hôpital ou Grange de Ste Croix, celles de Simoussais et de L'0ujarderie, le grand pré de Naudun (?) et celui de l'0uche, la maison de Ste Croix, les marais du fief de Jouet et des bois dans la paroisse de Deyrançon.
Il va de soi que pour la perception de leurs revenus et la régis de leurs domaines, les Feuillants avaient à Mauzé un fermier général. Le 25 avril 1697, la ferme générale des prieurés fut donnée à Samuel Challe et Françoise Fromentin, hôtes des Trois-Marchands.
En 1740, elle passa à Pierre-Daniel Roulleau, marchand et aubergiste du Chêne-Vert. On note ensuite les noms de Jacques Bernard et de Jean-Gabriel Bonneau, mais, en réalité, c'est la petite-fille de Pierre-Daniel Roulleau, Elisabeth Bourdon, successivement épouse Bernard, veuve Bernard, épouse Bonneau et veuve Bonneau, qui demeura jusqu'à la Révolution hôtesse du Chêne-Vert et fermière générale des prieurés (1).
Je crains fort, Madame, que tout ce qui précède vous ait déçu, car je suppose qu'en formulant votre question, vous pensiez à votre maison qui, avant la Révolution, si l'on en croit M. Besson, aurait servi de couvent aux religieux Feuillants et qu'on devrait trouver, par conséquent, au nombre des biens immeubles que les religieux s'étaient réservés. Tout ce que je puis vous dire, c'est que le sieur Pierre Marsillacq, marchand, en fit l'acquisition, en 1715, d'une certaine dame Marie Mallet, veuve de Jean Marchand, et que, si elle a servi de couvent au 17ème siècle - ce qui reste a prouver -, elle appartenait à des particuliers dès le début du 18ème. L'abbé Tribert en parle dans la Vieille Cloche. Avec la maison contiguë, à l'est, elle formait, dit-il, le Grand Logis. Mais il ne donne guère de détails. C'est pourtant une des plus anciennes maisons de Mauzé et, selon toute apparence, une des plus intéressantes. Vous en avez certainement exploré les moindres recoins et sonde les murs. Pourquoi ne la feriez-vous pas connaître aux lecteurs du bulletin ?
(1) Quand les biens du clergé furent vendus au profit de la nation, c'est la citoyenne Vve Bonneau qui acheta la métairie de la Grange, tandis que Jean Contancin se faisait adjuger Ste Croix et la métairie de l'Hôpital.